Le football professionnel est pour le meilleur et parfois le pire un laboratoire inspirant dans le domaine du management. La recherche de performance oblige à l'innovation tant sur le plan humain, que technique et organisationnel.
Le jeu à la nantaise fait rêver les spectateurs mais aussi les joueurs de football. Claude Lowitz nous raconte,en toute sincérité, son expérience nantaise sous l'ère de Miroslav Blazevic.
Pour mémoire, Claude Lowitz a été formé au Toulouse FC où il a joué pendant 4 saisons avant de connaître, dans le championnat de 1ère division, plusieurs autres équipes : le FC Metz avec la fameuse victoire contre le Barça en Coupe des Coupes, puis ensuite le PSG, l'Olympique de Marseille et Montpellier. C'est après ce magnifique parcours, au plus haut niveau, qu'il avait décidé de venir poser pour deux saisons, en 1989, son sac de sport en Loire Atlantique. Voici un entretien qu'il a eu la gentillesse de nous accorder :
Educateur né, Claude Lowitz se consacre aujourd'hui à la formation des jeunes joueurs. Après avoir vécu une expérience enrichissante de 2 ans en Chine à Shangai où il a structuré notamment le Centre de formation, il est depuis 2008 responsable du pôle espoir de la Réunion.
Raynald Denoueix a eu la gentillesse de nous accorder du temps pour ce quatrième entretien exclusif que nous avons voulu consacrer à la période actuelle. Il a apprécié de pouvoir exercer ce métier de consultant pendant quelques années. L'opportunité de prendre du recul et du plaisir, loin des enjeux immédiats. Compte tenu de son expertise dans l'univers du football, il représente aujourd'hui un observateur avisé des transformations en cours. Il nous délivre ici son analyse concernant les évolutions actuelles : style de jeu, rôle des joueurs, puissance athlétique.
L'occasion aussi de parler des à-cotés du jeu à savoir la place prise par la communication. Les médias sont devenus omniprésents et cela ne présente pas que des aspects positifs. Nous ne pouvions pas ne pas l'interroger aussi sur la situation actuelle de son club de coeur : le FC Nantes. Avec la sincérité qui le caractérise ,il ne se dérobe pas derrière quelques faux fuyants pour esquiver les questions. Il exprime la confiance qu'il a, de voir, les couleurs du club briller de nouveau. Et puis, il y a aussi les supporters nantais qu'il n'oublie jamais de mentionner. Il sait ce que le football doit à leur passion et à leur engagement.
Le business model du football est dans l'instabilité permanente depuis plusieurs années. Il souffre d'une trop grande dépendance aux droits TV. La crise sanitaire ne fait qu'accentuer le risque déjà existant pour les clubs professionnels d'être dans un déficit complètement dépendants des droits TV. Il est toujours possible de se raccrocher à l'idée que le football sera préservé d'une faillite à l'instar de ce que nous avons pu vivre préalablement avec le secteur bancaire. A l'image des banques, on assisterait donc à une socialisation des pertes. Le football serait donc l'exception culturelle.
Comment imaginer sérieusement un tel scénario ?
Nous voyons bien que de nombreux secteurs d'activité sont en apnée. Face à des situations de survie de leur propre travail les citoyens ne seront pas prêts à accepter ce genre de décision. Rappelons que l'hôpital ne dispose pas, aujourd'hui, des moyens nécessaires pour faire face à la pandémie. L'injustice serait-elle supportable ? Difficile à imaginer. Beaucoup de pays se sont déjà transformés en paradis fiscaux, exemptant les joueurs de football d’impôts et de charges sociales. La France a elle aussi cédé à cette tentation, avec le « droit à l’image collective ».
En France, la nomination du nouveau président de la Ligue de football va-t-elle apporter un renouveau au football français et l'inscrire dans le monde d'après ?... Le discours alarmiste de Vincent Labrune pouvait laisser espérer une prise de conscience. La réalité est toute autre. Il propose tout simplement de limiter la Ligue 1 à 18 clubs. Voilà l'idée géniale qui va permettre d'effacer l'ardoise.
Je pense qu'il devient urgent de rappeler quelques propositions connues par tous et qui ne font même pas l'objet d'une réflexion sérieuse des décideurs français et européens :
La mise en place d'un système de « salary cap » plafonnant la masse salariale des clubs. Il a fait ses preuves aux Etats-Unis. Le «salary cap» existe déjà dans le football européen (en L2 italienne). Il existe aussi avec un certain succès aussi en France dans le rugby (Top 14).
La nomination d'une "DNCG européenne" permettrait un vrai contrôle comptable et financier rigoureux des clubs car il est évident que les sanctions sont extrêmement rares, voire inexistantes. L'interdiction de la concurrence fiscale déloyale doit s'appliquer en Europe. Il s'agit d'étendre au football ce qui existe déjà pour la fiscalité des entreprises.
Un droit de regard des supporters sur les finances de leur club. L'actionnariat populaire est une réponse cohérente et une manière d'éviter ce que l'on voit aujourd'hui avec la main mise étrangère sur les clubs.A court terme, les clubs de l'hexagone seront entre les mains d'opérateurs chinois ou américains, voire d'Arabie Saoudite.
La victoire du FC Metz au Camp Nou, en octobre 1984, contre le FC Barcelone fait appel aux qualificatifs les plus élogieux. En effet, c'est la performance la plus surprenante jamais accomplie par un club français contre une grande équipe européenne. Cet exploit est même considéré comme l'un des plus grands retournements de l'histoire du football européen pour les 50 dernières années.
Il s'agit d'un premier tour de la Coupe d'Europe des vainqueurs de Coupe. Le match aller se joue à Saint Symphorien et les lorrains s'inclinent logiquement (2-4). La différence entre les deux équipes est telle que personne ne peut imaginer le scénario de la seconde manche. Nous vous proposons de le vivre à travers le témoignage d'un des héros du match à savoir Claude Lowitz.
Bernd Schuster proposa d'offrir à l'issue du match aller à Ettore et aux défenseurs messins "un jambon" pour les remercier des cadeaux offerts à Saint-Symphorien. Steve Archibald, l'Ecossais de Barcelone, chambra outrageusement les Messins les traitant même de "charlots". Il espérait rigoler encore davantage au retour. La partie de plaisir est devenue pour lui et ses équipiers un incroyable cauchemar. Pourtant, le Barça mène 1-0 dès la 33e minute avec l'ouverture du score par Paco Carrasco. C'était juste avant que le match bascule dans une forme de folie. En une minute (38e, 39e), Metz marque deux fois, grâce à Tony Kurbos et un but contre son camp de Sanchez. L'invraisemblable exploit devient alors envisageable. Il se matérialise en seconde période lorsque Tony Kurbos, ajoute deux buts, dont celui de la qualification, à seulement 5 minutes de la fin. Le football est un sport à part. Même le fait que le petit poucet lorrain terrasse le grand Barça. Sachez que ce jour-là les grenats n'ont pas offert le moindre cadeau aux Blaugrana. Inutile de dire que ce match d'anthologie restera à tout jamais dans l'histoire du football.
Marcelo Bielsa est considéré comme un entraîneur à part.
La première chose que l'on puisse dire c'est qu'il revendique haut et fort sa conception du football et qu'il ne triche pas avec ses principes. Il est toujours prêt à la défendre auprès de ses dirigeants, des journalistes... mais plus encore auprès des supporters dont il a un grand respect.
Les supporters marseillais conservent un souvenir intact de son passage éclair au sein du club. El Loco laisse une belle image et la "Bielsa Mania" se réveille à fréquence régulière au stade Vélodrome. A Leeds, les supporters lui adressèrent à l'issue de sa première saison au club une lettre bien émouvante «Vous avez contribué à redonner son identité à ce club après des années de mauvaise gestion. Si cette saison n’a malheureusement pas pris fin comme nous l’espérions, c’est une année exceptionnelle. Vous avez notre respect, notre admiration et notre soutien indéfectible. Nous croyons en votre philosophie et vous remercions pour tous vos efforts. Votre football nous fait rêver et nous espérons tous que vous continuerez à le faire la saison prochaine». C'est le message adressé par les membres du Leeds United Supporters Trust. Nous savons que la seconde année a été celle de la montée en Premier League.
Il est intéressant d'entendre la vision qu'il a du rôle des supporters, notamment dans le choix du style de jeu. Dans la vidéo à suivre il évoque cette question : est-ce que le but c'est seulement d'obtenir des résultats ?... Une manière de dire que la manière d'y parvenir compte aussi :
L'approche proposée est intéressante et elle donne à réfléchir sur l'identité du club, le choix du style de jeu mais aussi le rôle des supporters dans la vision du football qu'il s'agit de promouvoir. Il y a différentes manières de jouer au football avec comme objectif la volonté de gagner mais il n'y en a une dans laquelle les supporters du club doivent se reconnaître. Il rappelle que les différents acteurs ne sont rien les uns sans les autres. La versatilité du public existe aussi. Et cela, Marcelo Bielsa ne le perd jamais de vue.